Itinérance, insécurité et toxicomanie animent la rencontre citoyenne annuelle de Pierre-Luc Lachance

Lors de sa rencontre annuelle d'information, le conseiller municipal de Saint-Roch-Saint-Sauveur Pierre-Luc Lachance a été confronté par plusieurs citoyens et commerçants au bout du rouleau face aux conséquences de l'itinérance et de la toxicomanie dans le quartier Saint-Roch.

Itinérance, insécurité et toxicomanie animent la rencontre citoyenne annuelle de Pierre-Luc Lachance | 8 octobre 2024 | Article par Simon Bélanger

Pierre-Luc Lachance, conseiller municipal du district Saint-Roch - Saint-Sauveur, animait lundi soir sa soirée annuelle d'information.

Crédit photo: Simon Bélanger

Lors de sa rencontre annuelle d’information, le conseiller municipal de Saint-Roch-Saint-Sauveur Pierre-Luc Lachance a été confronté par plusieurs citoyens et commerçants au bout du rouleau face aux conséquences de l’itinérance et de la toxicomanie dans le quartier Saint-Roch.

Une cinquantaine de personnes étaient réunies lundi soir à la Maison de la coopération et de l’économie solidaire de Québec, sur le boulevard Charest Est, dans Saint-Roch. Après une rencontre dans Saint-Sauveur en 2023, c’était au tour de Saint-Roch de recevoir la rencontre annuelle d’information de Pierre-Luc Lachance.

Après une première heure consacrée à présenter les réalisations de la dernière année et les projets à venir, M. Lachance était présent pour répondre aux questions du public.

Les premières questions ont porté sur des problèmes causés par divers chantiers, principalement celui de la rue Saint-Vallier Ouest, dans le quartier Saint-Sauveur, mais aussi celui à venir de l’îlot Dorchester.

Mais très rapidement, le sujet de la soirée s’est imposé à travers une multitude de questions. Celles-ci portaient essentiellement sur l’itinérance, la consommation de drogues et le sentiment d’insécurité dans le quartier Saint-Roch.

Des commerçants n’excluent pas de quitter

Le 17 septembre dernier, plusieurs commerçants tiraient la sonnette d’alarme par le biais de la Société de développement commercial (SDC) St-Roch. On déplorait alors des vols, du vandalisme, du grabuge, mais aussi des problèmes d’insalubrité et d’incivilités. 

Plusieurs propriétaires de commerces, de restaurants ou d’établissements d’hébergement se sont invités à la rencontre animée par leur conseiller municipal. Et le constat semble sans appel.

«En tant qu’entrepreneure dans le quartier Saint-Roch, je me sens un petit peu laissée-pour-compte. Je me sens abandonnée par la municipalité, parce qu’en ce moment, c’est un petit peu un shit show dans le quartier. Un shit show de l’itinérance, de gens qui se piquent. C’est rendu qu’on peut se piquer et faire du crack sur la rue, et c’est […] normal…», a d’abord dénoncé Pénélope Lachapelle, copropriétaire de Nina Pizza.

Mme Lachapelle, qui souhaite continuer à investir dans le quartier, avoue ne pas exclure une relocalisation ailleurs dans les prochaines années, si la situation perdure.

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Pour Pierre-Luc Lachance, «la Ville n’a pas l’ensemble du portefeuille des solutions».

«La dynamique de l’itinérance, la dynamique de consommation de drogues, c’est une dynamique de santé publique. La Ville subit des choses. Est-ce que ça veut dire qu’il faut qu’on reste les bras croisés? Non. La preuve, c’est qu’on va rajouter encore 1 M$ pour assurer qu’il y ait plus d’intervenants sur le terrain, qu’il y ait plus d’interventions, qu’il y ait plus de surveillance qui soit fait», répond le conseiller municipal.

Celui-ci réitère qu’il ne «trouve pas normal et acceptable» que des gens fument du crack en présence d’autres personnes ou que des produits de consommation traînent dans les rues et les parcs. Il ajoute qu’une annonce à venir concernant une initiative de nettoyage du quartier sera bientôt faite par l’administration municipale.

M. Lachance précise aussi que le prochain budget accordera un plus grand financement au Service de police de la Ville de Québec (SPVQ), afin de mieux outiller les policiers face à cet enjeu. Plusieurs commerçants déplorent que, lorsqu’ils appellent au 911, les policiers n’arrivent pas ou arrivent plusieurs heures après la demande.

Peur de laisser son enfant sortir

Des parents du quartier Saint-Roch ont aussi exprimé des inquiétudes pour leurs enfants ou ados. Des pères et des mères ont affirmé craindre de laisser sortir leurs enfants dans le quartier sans les accompagner.

Résident de Saint-Roch, Louis Campagna dénonce une situation vécue par sa fille alors âgée de 13 ans l’an dernier.

«[Elle] m’a demandé d’aller acheter du pain à la boulangerie seule, parce qu’elle veut développer son autonomie. À l’heure du midi, hésitant, parce que je connais mon quartier, je dis “OK, vas-y”. Effectivement, elle revient en pleurs, parce que quelqu’un complètement intoxiqué, de deux fois et demie son âge, l’a abordée de manière sexuelle. […] Je tremble en en parlant. Ce n’est pas la première fois que ça y arrive», raconte M. Campagna.

Pour lui, une adolescente qui irait acheter du pain sur l’avenue Maguire ou l’avenue Cartier n’aurait pas à vivre cette situation. Il dénonce une inégalité dans le sentiment de sécurité pour Saint-Roch par rapport à d’autres quartiers de Québec.

Propriétaire de la boutique Cœur de Loup et père de trois ados, Vincent Poitras réside sur la rue Saint-Vallier Est, près du centre d’injection supervisée L’Interzone.

«On est arrivés là avec plein de bonne volonté et de confiance en nos institutions, notre CIUSSS, notre Ville de Québec. […] À chaque jour, on a peur de sortir de chez nous. À chaque jour, on constate une urgence. […] Quand il y a une inondation, on envoie la voirie, la santé publique, on ne regarde pas à la dépense. En ce moment, c’est une urgence. […] J’ai une fille de 17 ans qui me demande de sortir avec elle pour pouvoir se rendre jusqu’au coin de la rue, parce qu’elle a peur de sortir de chez elle», regrette M. Poitras, qui dénonce une situation «invivable».

M. Poitras souhaite que Pierre-Luc Lachance soit le «porte-parole» du quartier auprès de la Ville et des autres paliers gouvernementaux.

«Je suis un de ceux qui demande le plus. Je suis un de ceux qui amène, dans le discours du maire qu’il a auprès du ministre [responsable des Services sociaux Lionel] Carmant, du CIUSSS, cette volonté d’être agressif sur [la façon d’aborder] le problème et ne pas juste essayer de contenir», répond M. Lachance.

Il a tout de même rappelé, à quelques reprises, qu’il ne pouvait pas se «substituer au processus opérationnel» des policiers et que la politique ne devait pas s’ingérer dans les décisions ou les orientations de la police.

Une cinquantaine de personnes étaient présentes lors de la soirée d’informations de Pierre-Luc Lachance.
Crédit photo: Simon Bélanger

Des solutions remises en doute

En plus de vouloir augmenter le budget consacré au SPVQ, Pierre-Luc Lachance affirme que le financement doit aussi être dirigé vers les organismes communautaires du quartier.

Pour Simon Gauthier, qui réside près de Lauberivière, «les organismes communautaires […] font partie du problème», en raison de «leur idéologie».

«Il y a une personne qui travaille pour le RAIIQ (Regroupement pour l’aide aux itinérants et itinérantes de Québec) qui, lors d’une soirée à l’Engrenage, a déclaré, “quand il y a du vandalisme, des méfaits ou quoique ce soit d’autre, laissez la personne s’exprimer.” […] Ce sont souvent des gens qui sont d’extrême-gauche […] et c’est beaucoup de ces personnes-là qui travaillent pour les organismes communautaires. Donc, en finançant davantage les organismes communautaires, […] on donne du pouvoir à des gens […] qui sont contre la prise en charge», argue M. Gauthier, reconnaissant lui-même que sa position n’est pas nécessairement populaire.

Un homme s’est d’ailleurs levé tout juste après l’intervention pour affirmer son objection à ce propos. Pierre-Luc Lachance a aussi affirmé qu’il n’endossait pas ce qui venait d’être dit.

Centre d’injection

De son côté, Catherine Bowen Gouin, propriétaire du 77 St-Vallier Appart Hôtel, a encore sur le cœur l’ouverture du centre d’injection supervisée en 2021. Et elle estime que la Ville ne comprend pas la détresse des commerçants.

«Je vous entends, mais je ne pense pas que vous nous entendez. On a tous des droits en tant qu’entrepreneurs, propriétaires, résidents. Même nos clients ont des droits. Et c’est le droit à la sécurité. Présentement, j’ai la chair de poule quand je vous parle, parce que c’est rendu que c’est de même que je me sens quand je vais travailler le matin ou que je quitte mon hôtel le soir, ou quand je reçois des appels en pleine nuit, parce que j’ai des clients qui se sentent insécures et qui ne sont pas capables de dormir dans leur appart. Ce n’était pas comme ça avant l’ouverture d’une piquerie, en face de mon commerce«, peste-t-elle.

Mme Bowen Gouin ajoute que plusieurs personnes sont présentes lors de la rencontre parce qu’elles sont «à fleur de peau» et qu’elles n’en peuvent plus.

«Je pense qu’il faut se serrer les coudes ce soir et c’est l’union qui va faire la force. Si M. Lachance n’est pas capable de l’entendre et de faire respecter nos droits, on va aller chercher ce qu’il faut ailleurs», a conclu la jeune entrepreneure.

L’élu de Saint-Roch-Saint-Sauveur a ensuite répondu que des élections auront lieu en novembre 2025.

La soirée a d’ailleurs été marquée par quelques échanges plus tendus et corsés entre Pierre-Luc Lachance et certaines personnes présentes dans l’assistance.

Solutions

Le conseiller municipal a demandé, à quelques reprises, si des gens avaient des solutions à proposer. M. Lachance a lui-même rappelé qu’un projet de mini-maisons dans un autre quartier de Québec sera déployé.

De son côté, Alain Saint-Ours a proposé de privilégier l’intervention des pompiers plutôt que des policiers.

«Pourquoi les pompiers? Parce que les pompiers, comme ressource, c’est eux autres qui ont le moins d’appels dans une année. […] Parce qu’ils traitent le sans-abri comme un sinistré. […] Ce sont des spécialistes du sinistre, les pompiers», illustre M. Saint-Ours.

Il semble avoir été inspiré par un projet mis en branle à Saskatoon en 2021 et expliqué dans un article de La Presse du 18 août dernier.

Finalement, alors que plusieurs personnes ont exprimé ne pas savoir à qui s’adresser lorsqu’elles vivent des situations difficiles, Pierre-Luc Lachance a invité les gens présents à écrire à infocarrelepine@ville.quebec.qc.ca ou à contacter le 311 et mentionner «Info Carré Lépine» d’entrée de jeu, même si la situation ne se déroule pas dans le secteur du Carré Lépine.

Il précise cependant que si on vit une situation où on se sent en danger, il faut toujours contacter le 911.

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