Malgré la chaleur accablante qui régnait sur Québec mercredi soir, plus d'une vingtaine de personnes ont assisté à une rencontre organisée par l'Engrenage Saint-Roch. L'organisme souhaitait valider quelques préoccupations exprimées lors de rencontres d'information citoyenne organisées par le groupe Trudel pour présenter le projet prévu sur l'îlot Dorchester.
Îlot Dorchester : des citoyens préoccupés par le projet de Trudel
Malgré la chaleur accablante qui régnait sur Québec mercredi soir, plus d’une vingtaine de personnes ont assisté à une rencontre organisée par l’Engrenage Saint-Roch. L’organisme souhaitait valider quelques préoccupations exprimées lors de rencontres d’information citoyenne organisées par le groupe Trudel pour présenter le projet prévu sur l’îlot Dorchester.
Lors de ces quatre rencontres tenues à la fin du mois de mai, des gens de la table de quartier L’Engrenage St-Roch étaient présents. En plus de connaître plus en détails le projet, cette présence visait à entendre les questions et commentaires des citoyens présents.
«Ce soir, on vient valider des préoccupations partagées lors des soirées d’information organisées par Trudel. On a assisté aux quatre. On voulait voir si c’était une préoccupation d’une personne ou de plusieurs personnes», annonce d’entrée de jeu Marie-Noëlle Béland, directrice générale de l’Engrenage.
Retour dans le passé
Avant d’entrer dans le vif du sujet, Alexandre Allard, coordonnateur du chantier Développement durable à l’Engrenage, a fait une courte revue historique des enjeux qui ont animé le quartier lors de l’élaboration des deux derniers Plans particuliers d’urbanisme (PPU) dans Saint-Roch.
Il a notamment rappelé la grogne citoyenne lors du PPU Entrée de ville Saint-Roch, adopté en 2013, qui avait autorisé un zonage allant à 60 mètres de hauteur. Celui-ci allait mener à la construction de la tour Fresk, voisine de la bibliothèque Gabrielle-Roy, qui compte 20 étages.
Un second PPU, visant plutôt le secteur sud de Saint-Roch, s’intéressait notamment au secteur de l’îlot Dorchester, alors détenu par le promoteur Kevlar. Il semblerait alors que le PPU adopté en 2017 ait davantage fait l’objet de compromis avec les citoyens du quartier. À l’époque, Kevlar prévoyait notamment des immeubles de bureaux et jusqu’à 200 logements. Le projet n’a finalement jamais eu lieu.
De son côté, le groupe Trudel, détenu par les frères Jonathan et William Trudel, ont mis la main sur l’îlot Dorchester en 2022, pour la somme de 6 M$. Ces promoteurs sont déjà derrière trois projets de transformation de centres commerciaux à Québec : Fleur de Lys, Galeries Charlesbourg et Place Quatre-Bourgeois.
Des bâtiments de 6 à 20 étages
L’équipe de l’Engrenage a procédé à un résumé du projet présenté par Trudel. Marie-Noëlle Béland et Alexandre Allard ont quant même ajouté qu’il pouvait manquer certaines précisions, ne prétendant pas présenter un projet exact. Pour l’instant, en dehors des rencontres citoyennes, Trudel n’a pas encore présenté de plan officiel à plus grande échelle.
D’ouest en est, un parc urbain de 10 000 pieds carrés serait d’abord aménagé au coin des rues Sainte-Hélène et Caron. Ensuite, deux bâtiments de six étages (18 mètres) seraient construits. Une percée visuelle serait aussi envisagée vers la rue des Voltigeurs. Il n’est pas exclu qu’une rue débouche entre ces deux bâtiments.
En poursuivant vers l’est, deux autres immeubles de 10 et 12 étages (30 et 36 mètres) s’ajouteraient. Un passage piéton serait aussi aménagé vers la rue Narcisse-Belleau. En raison de la pente, celui-ci ne pourrait être accessible de façon universelle, mais Trudel pourrait envisager une montée mécanique dans l’un des bâtiments.
Un dernier bâtiment comptant jusqu’à 20 étages (60 mètres) serait construit près des rues Sainte-Hélène et Dorchester. Le tout serait complété par une placette urbaine fermant le coin des rues Dorchester et Saint-Vallier Est.
Logements, épicerie, hôtel…
Au total, 390 logements seraient prévus, principalement des 3 1/2 et des 3 1/2 + (3 1/2 avec une pièce un peu plus petite). Quelques studios et 4 1/2 seraient aussi prévus.
15% des logements seraient abordables. Selon la définition de la Société canadienne d’hypothèque et de logement (SCHL), il s’agit d’un logement pour lequel un ménage consacre moins de 30% de son revenu avant impôts. 10% des logements pourraient être adaptés ou adaptables. Ces conditions sont d’ailleurs déjà présentes dans d’autres projets en cours chez Trudel.
On prévoit une mixité d’usages, avec des commerces au rez-de-chaussée. Un marché d’alimentation grande surface (possiblement un Maxi) serait également dans les plans.
Également, pour l’édifice de 20 étages, 10 d’entre eux pourraient être réservés à un hôtel de 175 chambres.
Selon les plans actuels, un stationnement souterrain de plus de 600 places serait aménagé. Rappelons que l’actuel stationnement Dorchester compte 340 cases. 100 cases seraient réservées pour l’épicerie. De plus chaque logement et chaque chambre d’hôtel aurait sa case de stationnement.
Trudel annonce aussi que 15 000 pieds carrés de la propriété seraient dédiés au verdissement. Des arbres à grand déploiement pourraient être plantés dans le parc urbain et d’autres arbres seraient plantés en fosse le long de la rue Saint-Vallier Est. Il pourrait aussi y avoir des toits verts sur les divers immeubles, sans que ceux-ci soient des toits verts intensifs.
Finalement, les bâtiments reprendraient le style industriel en brique aux premiers étages, alors que les surhauteurs incluraient de la tôle canadienne.
Inquiétudes sur le logement, le stationnement, l’hôtel…
Après une brève présentation du projet préliminaire, les citoyens présents étaient invités à indiquer les sujets qui les préoccupaient davantage, autour de cinq grandes thématiques : le logement, l’environnement, le vivre-ensemble et la cohabitation, le transport et la mobilité, ainsi que la vocation, l’apparence et la hauteur du bâtiment. Il était également possible de s’exprimer sur quelques points positifs.
Sur la question du logement, plusieurs ont exprimé leur déception face au manque de logements à plus faible coût. Plusieurs auraient souhaité davantage de logements sociaux. On indique également que les prix des logements sont trop élevés pour véritablement contribuer à atténuer la crise du logement. Un citoyen a également exprimé sa déception quant à la place dédiée aux familles dans ce projet, alors que les logements ne sont pas suffisamment grands pour accueillir plus de personnes. Une autre citoyenne a quant elle ajouté que des besoins sont aussi criants pour les ateliers d’artistes dans le secteur.
Côté transport, le stationnement est aussi au cœur des préoccupations de plusieurs, qui sont bien perplexes à l’idée que le nombre de cases soit presque doublé par rapport au nombre d’espaces actuels. On trouve qu’une voiture par logement et par chambre, en plus des cases réservées pour l’épicerie, c’est très élevé.
Dans la section consacrée au vivre-ensemble et la cohabitation, plusieurs ont remis en doute le besoin d’un hôtel dans le quartier, considérant une offre touristique déjà bien présente. Des personnes remettent en doute l’idée selon laquelle cet hôtel serait indispensable pour des questions de rentabilité.
Verdissement, hauteur, dynamisme
Pour l’environnement, on craint que le verdissement proposé ne soit pas suffisant pour lutter contre les îlots de chaleur. Une citoyenne, impliquée dans Verdir et divertir, indique que l’organisme a été approché par Trudel. Des suggestions, bémols et points positifs ont été envoyés en retour, mais l’organisme attendrait toujours un accusé de réception.
Finalement, du côté de la hauteur du bâtiment, les opinions pouvaient sembler partagées. Pendant que des citoyens estiment que la hauteur, jusqu’à 20 étages, pourrait être problématique et confirmer un précédent créé par la tour Fresk, d’autres estiment que des édifices en hauteur sont une bonne idée, pour répondre aux besoins de densification.
D’ailleurs, parmi quelques points positifs, un citoyen a écrit que le projet pourrait venir apporter un certain dynamisme au quartier Saint-Roch. D’autres, malgré des réserves exprimées, ont au moins souligné que l’entreprise Trudel présente son projet devant les citoyens.
Attentes envers la Ville
Pour plusieurs personnes présentes hier soir, la Ville de Québec devrait être davantage proactive dans le dossier. On estime notamment qu’elle doit s’impliquer pour orienter les usages.
Des citoyens ont aussi demandé que le conseil de quartier de Saint-Roch soit à l’avant-plan pour organiser une séance d’information. Alexia Oman, présidente du conseil de quartier, était présente hier soir. Elle a confirmé que le conseil de quartier fera tout ce qui est en son pouvoir pour planifier ce type de rencontre.
Conseiller municipal de 2005 à 2009, Pierre Maheux a quant à lui perçu que les gens de Trudel étaient «mal à l’aise», parce qu’ils «débarquent dans un secteur qu’ils ne connaissent pas». En comparant avec les autres projets prévus sur des terrains de centres commerciaux, il avance qu’ils doivent gérer beaucoup plus directement avec des voisins.
Prochaines étapes
Du côté de l’Engrenage, un mémoire sera rédigé dans les prochaines semaines, qui reviendra sur différents commentaires émis mercredi soir.
Pour ce qui est du projet de Trudel, aucun échéancier officiel n’est avancé. Selon un article publié dans Le Soleil, l’entreprise voudrait débuter les travaux au début de l’année 2025 pour se conclure au milieu de l’année 2027. Trudel doit également produire son propre mémoire, qui fait un retour sur les différentes rencontres avec des groupes et citoyens de Saint-Roch.
Dans le cadre de d’autres projets, comme Fleur de Lys et les Galeries Charlesbourg, les citoyens et conseils de quartier touchés avaient été mis à contribution lors de rencontres de consultation.
Également, le jour de la publication de l’article du Soleil, David Chabot, employé de Trudel, a tenu à mentionner sur le groupe Facebook Comité citoyen de Saint-Roch — Ville de Québec que «le projet n’est pas “canné” d’avance». Il précise que certains éléments pourront être ajustés, en fonction «des critiques constructives» et d’une «réalité économique à respecter». M. Chabot ajoutait qu’il y a «du jeu sur l’aménagement et la conception finale du projet.
Cet article bénéficie du soutien de l’Initiative de journalisme local, financée par le gouvernement du Canada.
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