Wartin Pantois: un artiste de Saint-Roch s’expose au Musée

Notamment connu pour ses œuvres d’art en milieu urbain, l’artiste de Saint-Roch Wartin Pantois s’expose au Musée de la civilisation. Son œuvre Agora, un collage sur mur intérieur de 4,8 mètres de hauteur par 9,4 mètres de largeur, y est dévoilée ce mercredi 13 septembre. Il s’agit de la plus grande œuvre d’art réalisée par l’artiste en intérieur à ce jour.

Le Musée de la civilisation a invité Wartin Pantois à créer une œuvre pour la zone S’engager de l’espace communauté Voie Libre, un tiers lieu à la disposition des citoyens afin qu’ils puissent porter un regard critique sur des enjeux contemporains.

Agora (voir galerie photos au bas) est composée d’une centaine de portraits noir et blanc ainsi que de l’image pixelisée d’une agora usée par temps, sur fond rouge. Le collage sur mur sera exposé au Musée pour deux ans, jusqu’en septembre 2025, après quoi il sera détruit.

Intelligence artificielle

En 2022, Wartin Pantois avait généré un millier de portraits humains grâce à l’intelligence artificielle (IA) pour une œuvre vidéo. Il a ensuite pigé dans ses créations pour choisir les visages en vedette dans Agora, raconte-t-il en entrevue téléphonique le 12 septembre.

Lorsqu’on conçoit des images grâce à l’IA, on peut donner des instructions très précises pour générer des portraits de personnes de genres, d’âges ou de couleurs de peau différentes, par exemple. L’artiste s’est toutefois gardé de fournir des critères stricts en matière de personnages pour se laisser surprendre par la technologie.

Les portraits d’Agora varient en matière d’âges, de genres et d’origines. Leurs expressions et traits souvent énigmatiques et ambigus donnent cependant un indice quant à leur création par intelligence artificielle.

« Je les trouve très beaux, ces humains-là. Même s’ils sont créés par l’IA, (ils ont) quelque chose d’humain », dit l’artiste en parlant de ces personnes fictives. Les portraits évoquent « une inquiétante étrangeté » tout en ayant un côté familier, ajoute-t-il.

Démocratie

À l’ère des images et vidéos deep fake, l’œuvre soulève de nombreuses questions sur la démocratie à l’ère numérique.

« Agora est une œuvre solennelle et intrigante offrant plusieurs niveaux de lecture. Polysémique, elle invite à une réflexion sur la manière dont nous pouvons penser notre citoyenneté face aux enjeux d’un monde en changement, notamment sa dématérialisation et son accélération numérique. L’œuvre interroge nos repères, nos identifications personnelles et collectives, ainsi que les différentes temporalités qui les traversent », peut-on lire dans un communiqué émis par Wartin Pantois.

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L’œuvre propose un questionnement sur la manière dont notre monde est façonné et influencé par la technologie et l’IA, ainsi que sur les implications que cela peut avoir sur la circulation des idées et des idéaux démocratiques.

Le titre de l’exposition fait directement référence à l’agora, ce haut-lieu de la démocratie de la Grèce antique, où l’on discutait des enjeux de la Cité.

Pour l’artiste, la démocratie, c’est la diversité des points de vue, les discussions et les débats, dit-il à Monquartier. Pour plusieurs citoyens, la notions se limite toutefois à « voter aux quatre ou cinq ans », déplore Wartin Pantois lors de notre entretien.

« Les visages d’Agora semblent fixer les visiteurs des yeux, établissant ainsi un lien silencieux avec eux. La disposition en grille des portraits rappelle celle d’un mémorial, un lieu de recueillement où le temps est suspendu. Alors que la scène semble figée, l’espacement des portraits dessine des intersections qui permettent d’imaginer la circulation d’idées, d’opinions et de savoirs, qui sont essentiels en démocratie. L’agora en ruine rappelle quant à elle un certain effritement de la démocratie, tandis que la pixellisation réfère aussi bien à sa transformation qu’à sa sauvegarde à l’ère numérique », ajoute le communiqué.

Wartin Pantois: cultiver le mystère

Wartin Pantois, dont la véritable identité demeure un mystère, vit à Saint-Roch. Son art in situ s’infiltre notamment dans l’espace public et dans des lieux non conventionnels. Détenteur d’une maîtrise en sociologie et d’une seconde maîtrise en arts visuels, on a pu admirer son travail au théâtre de La Bordée et à la bibliothèque Gabrielle-Roy, entre autres.

Parmi ses nombreuses œuvres et interventions, on lui doit aussi un collage clandestin éphémère en soutien au mouvement de contestation contre le régime autoritaire iranien. L’œuvre photographique sur mur de 190 par 290 centimètres a pris place en juillet 2023 à l’angle des rues de la Chapelle et Saint-Joseph, dans Saint-Roch.

Cet artiste visuel et sonore engagé a effectué des interventions artistiques aux États Unis, en France, en Allemagne, au Portugal et au Canada. Il a collaboré avec de nombreux organismes artistiques et communautaires au fil des années.

En 2019, une de ses œuvres est entrée à l’Assemblée nationale du Québec dans l’exposition permanente Inspirer dédiée à l’art agissant sur la société. En 2020, il a obtenu une bourse de recherche et création du Conseil des arts du Canada, puis une bourse de résidence de la Fondation René-Richard.

Le Musée de la civilisation

Le Musée de la civilisation est un des plus grands musées publics québécois. Situé dans la basse-ville de Québec, dans le Vieux-Québec, il présente des expositions thématiques temporaires et permanentes en lien avec l’histoire, les enjeux de société, les sciences humaines et sociales.

L’accès au Musée est gratuit le premier dimanche de chaque mois pour les résidents et résidentes du Québec.

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