À l'approche de leurs 35 ans en 2024, L'Archipel d'Entraide revient sur certaines de ses missions dans Saint-Roch. Depuis deux ans, l'organisme observe une nette augmentation des personnes itinérantes dans le quartier et le lot de difficultés.
L’Archipel d’Entraide fête bientôt ses 35 ans
À l’approche de leurs 35 ans en 2024, L’Archipel d’Entraide revient sur certaines de ses missions dans Saint-Roch. Depuis deux ans, l’organisme observe une nette augmentation des personnes itinérantes dans le quartier et le lot de difficultés.
« Depuis des années, on vient en aide aux adultes très défavorisés », expose Pierre Maltais, intervenant-mentor à L’Archipel d’Entraide depuis plus de 25 ans.
Pour lui, le fait d’être situé en Basse-Ville n’est pas anodin.
« On est beaucoup confronté à l’enjeu de l’itinérance. On rencontre des personnes avec des dépendances ou des problématiques multiples, comme la santé mentale ou à risque d’itinérance », explique-t-il.
Les problèmes des personnes en situation d’itinérance touchent différents aspects.
« Les gens ont soit des problèmes d’argent, soit ils n’ont pas à manger, soit ils sont sans toit. Leurs chaussures sont percées. Dans notre société, certains achètent des jeans avec des trous, parce que c’est à la mode. Ici, ils portent des pantalons, si on peut appeler ça des pantalons, avec de vrais trous », décrit-il.
L’Institut universitaire en santé mentale du Québec (IUSMQ) réfère en partie ses bénéficiaires aux services de L’Archipel.
« D’autres références émanent également du CLSC Limoilou, CLSC Basse-Ville ou même de la Haute-Ville », ajoute Monsieur Maltais.
Les personnes peuvent aussi venir d’elles-mêmes pour faire une demande d’aide.
L’exemple du service Accroche-toit
Parmi les nombreux services proposés, on retrouve Accroche-toit.
« Parmi notre banque de propriétaires, certains ont une chambre à louer avec une pension. Ces derniers acceptent de recevoir notre clientèle », développe-t-il.
Une condition indispensable est le suivi par l’organisme avec la personne en question.
« On accompagne cette personne-là. Autrement dit, on devient alors leur intervenant social », précise M. Maltais.
Une approche centrée sur les « forces de la personne »
« Pour les découvrir, il faut lui poser des questions et avec son accord. Si on veut aider quelqu’un, on doit connaitre un minimum la personne via son réseau familial, social, etc. », indique-t-il.
« On établit ensemble un plan d’action. On commence à définir les priorités de la personne, comme le besoin de trouver un endroit où dormir».
Cependant, il arrive que des personnes soient réfractaires à ce genre de services en raison de leur degré de désaffiliation de la société.
« Certains préfèrent rester vivre dans la rue, parce que c’est leur mode de vie depuis longtemps ou pour d’autres raisons. Ils estiment y être mieux », constate-t-il.
Des difficultés à différents niveaux
Depuis quelques années, L’Archipel d’Entraide fait parfois face à quelques contraintes.
« L’une des difficultés principales est le fait de travailler avec des humains et qui eux-mêmes vivent des choses difficiles. Parfois, cela peut avoir des conséquences fâcheuses », confie Francine Chatigny, coordinatrice au magazine de rue La Quête depuis 12 ans.
« On a déjà eu des situations où les intervenants peuvent subir des insultes, des agressions, etc. Les gens sont davantage en détresse et cela n’est pas sans impact. J’ai moins ce souvenir-là lors de mes débuts. »
D’après elle, l’absence de stationnement est une autre difficulté importante dans le travail des intervenants.
« Ils ont besoin de leur auto pour accompagner les gens à l’hôpital, au palais de justice ou n’importe où, mais on n’a pas de stationnement. Cela peut arriver plusieurs fois dans une journée. La Ville refuse de nous accorder des vignettes. Enfin, on en a une seule pour l’ensemble des intervenants », révèle-t-elle.
La coordinatrice donne un exemple concret pour illustrer ce problème.
« Si on est avec quelqu’un qui est en crise suicidaire et qu’on doit aller déplacer notre voiture au même moment, c’est impossible et incompatible. On ne peut pas faire ça. »
Pour Pierre Maltais, la distance nécessaire à maintenir avec les personnes prises en charge représente une autre difficulté.
Une évolution dans les services
Depuis 2020, l’organisme communautaire garantit un service de répit.
Pour M. Maltais, on ne retrouve pas uniquement des itinérants. Selon lui, ce sont des personnes sans réseau social ou familial, qui vivent avec un problème de santé mentale ou d’une autre nature.
« Le répit est un point de chute pour ces personnes-là », affirme-t-il.
« Les changements viennent avec la clientèle. Donc, on s’adapte à celle-ci et pas l’inverse. »
Pour Mme Chatigny, le changement de certaines substances a modifié le comportement des gens qu’on accueille. C’est le cas notamment avec les drogues.
« Il y a plus d’agressivité aujourd’hui. On peut vraiment faire le parallèle avec la consommation de drogues », observe-t-elle.
À ses yeux, la société moderne n’aide pas non plus avec la pression de la performance et le stress.
« Oui, l’itinérance peut toucher tout le monde. Je me souviens de quelqu’un qui a été médecin ou même encore dentiste. Parfois, la maladie change aussi les gens, ou encore d’autres drames personnels », remarque-t-elle.
Enfin, la question du financement est à prendre en considération.
« Le gouvernement va accorder des budgets à l’itinérance, mais est-ce que ce sera efficace ? En tout cas, ce ne sera pas suffisant. On a besoin de moyens financiers importants. Il y a toujours ce manque de personnel à cause des budgets, que ce soit à L’Archipel ou chez d’autres organismes », insiste Monsieur Maltais.
En 2019, le Québec comptabilise autour de 5 789 personnes en itinérance dans le dernier rapport du ministère de la Santé et des Services sociaux.
Cet article a été produit par Anne Charlotte Gillain, journaliste de l’Initiative de journalisme local.
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