Féministe, à ma façon, de Richard Baillargeon : un plaidoyer pour l’ouverture et le dialogue

Après ses opus 401 petits et grands chefs-d'œuvre de la chanson (2009) et Du bon usage des palmarès (2019), Richard Baillargeon résume dans son nouvel essai, Féministe, à ma façon, sa vision du féminisme et des relations humaines en général.

<em>Féministe, à ma façon</em>, de Richard Baillargeon : un plaidoyer pour l’ouverture et le dialogue | 20 décembre 2022 | Article par Jean Cazes

Rencontre avec Richard Baillargeon le 3 décembre 2022. « Au cœur de ce livre, une conviction : La façon de considérer les femmes est de les traiter d’égal à égal. Ne serait-ce pas une bonne définition du féminisme? »

Crédit photo: Jean Cazes

Après ses opus 401 petits et grands chefs-d’œuvre de la chanson (2009) et Du bon usage des palmarès (2019), Richard Baillargeon résume dans son nouvel essai, Féministe, à ma façon, sa vision du féminisme et des relations humaines en général.

La vision de l’auteur se présente comme celle « d’un homme qui a du vécu ». Le premier chapitre s’intitule : « Féministe, comment peut-on ne pas l’être? ». Richard Baillargeon y souligne que du plus loin qu’il se souvienne, il a toujours été « inconsciemment féministe sans savoir que je l’étais ».

« Quel que soit le contexte, j’ai la stricte conviction que gars ou fille, chaque être humain devrait se voir offrir les mêmes opportunités sociales, les mêmes conditions de travail en toutes circonstances. Cette conviction me vient sans doute des propos entendus dans mes années d’enfance, lors de conversations familiales. En fait, si les actions d’éclat ont le mérite d’être mobilisatrices, les simples gestes et paroles du quotidien ont sans doute eu sur moi un impact plus durable, que ce soit au plan culturel ou civique. »

Né en 1950 dans Bellechasse, le résident de longue date de Saint-Roch affiche, « comme la majorité des gens » écrit-il, « un féminisme d’affirmation, et non une attitude de revange, à moins que celle-ci ne soit teintée d’une certaine ironie libérante ». Richard nous confie se tenir généralement à l’écart des actions militantes et politiques. Son approche bien personnelle est davantage forgée par ses observations de la vie de tous les jours.

Une multitude d’autres réflexions de son cru enrichissent l’ouvrage de 130 pages sur 10 chapitres. L’auteur accorde une grande place à l’histoire du féminisme, souvent semée d’embûches, comme il le rappelle. Cela, depuis les déesses-mères au temps du Paléolithique jusqu’au contexte québécois de la Révolution tranquille. Il donne notamment comme exemples l’adoption du bill 16, et au plan culturel, des initiatives telles que Les folles Alliées et plus récemment, La revengeance des duchesses. Retenons aussi le recensement de ce qu’il qualifie de « mots pervertis » comme « identitaire », « systémique » ou « culture », un « autre mot tellement vaste que l’on emploie à toutes les sauces », soutient Richard.

Faut-il en outre le souligner, l’intérêt de parcourir Féminisme, à ma façon repose également sur quelque 200 notes et références, en plus des 45 suggestions pour tous de lectures sur le thème central de l’essai.

Des femmes inspirantes…

Richard Baillargeon prend plaisir à citer dans la trame de son ouvrage une multitude de chansons. Il dédie ses réflexions à la « mémoire indispensable » de trois autrices, « mes trois ABC plus essentielles que jamais » : Anne Sylvestre (1934-2020), Benoite Groulx (1920-2016) et Christine de Pizan (1364-1430).

Anne Sylvestre.

Son admiration pour Anne Sylvestre remonte à la  prestation de l’artiste qu’il a savourée au début des années 1970 sur la terrasse Dufferin. Elle était alors accompagnée de Pauline Julien. Deux chansons engagées l’avaient particulièrement ébranlé : « Une sorcière comme les autres » et « Non, tu n’as pas de nom »

Trois ans plus tard, l’essayiste découvre cette fois Benoîte Groult par son bouleversant Ainsi soit-elle.

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« Il est impossible d’imaginer que quiconque ne devienne pas féministe après avoir fait cette même lecture », écrit-il.

Sur l’écrivaine Christine de Pizan à qui l’on doit une œuvre majeure, La Cité des Dames, rédigée en plein moyen âge, Richard écrit :

« Il est pleinement justifié de parler d’une auteure au sens moderne du terme. Elle trouve sa motivation en dépeignant la réalité des femmes de l’époque en riposte aux attaques misogynes d’auteurs » qu’il se plaît à citer.

… et une rencontre déterminante

L’autrice au franc-parler, Martine Delvaux.
Crédit photo: Valérie Lebrun

Richard Baillargeon témoigne : Martine Delvaux fut, en quelque sorte, le fer de lance de sa démarche d’écriture entreprise peu avant la pandémie. C’était en 2018, lors de leur première rencontre au lancement de Thelma, Louise et moi, à la Librairie Pantoute.

Dans son chapitre Lettre à Martine, Richard écrit que la parution du Boys club, l’année suivante, « a constitué un point tournant dans l’expression médiatisée du support et/ou d’un certain rejet du féminisme »…

« Il y avait toujours quelqu’un à quelque part pour la critiquer, insiste-t-il en entrevue. Ont-ils lu ses livres ou marchent-ils sur la rumeur? J’ai bien senti qu’elle avait son point de vue, en reconnaissant qu’elle ne pouvait pas prendre celui d’un homme. Mais au lieu d’y aller de front en discutant sur un tel sujet sensible, j’amène de nouvelles idées avec le souci d’un échange cordial. »

Toujours dans cet esprit de « conciliation » qu’il défend, il écrit au chapitre « Une vision féministe de la vie » :

« J’en suis ressorti plus convaincu que jamais qu’une des clés du vivre ensemble réside dans une saine curiosité à l’autre. Après avoir rencontré une personne d’un autre quartier, d’un autre horizon, d’une autre condition ou d’une autre conviction, si on a pu partager au moins un point de vue commun, il devient difficile de démoniser cette même personne comme nous incitent très souvent à le faire les intolérances de tout poil. C’est ce que je me suis efforcé de mettre en relief aux chapitres précédents. […]

Une autre de ces précieuses clefs est l’humour. Il est bon de rappeler ici que l’humour véritable, celui qui a un effet guérisseur, est l’autodérision. »

Vers la fin de son essai, l’auteur ajoute qu’il est de notre devoir, d’ajuster notre vocabulaire « avant que les débats ne soient trop polarisants, surtout ceux qui n’ont pas lieu, car ils laissent place à toutes les dérives ».

Et de conclure Richard Baillargeon au terme de notre entrevue :

« J’aimerais que mon livre suscite de vrais débats. Il y a une démarche pacifiante à sa lecture, si on prend bien sûr la peine de la faire. »

L’ouvrage Féministe, à ma façon (éditeurs CRESCENDO!) est en vente notamment dans les deux succursales de Pantoute et à la Librairie Morency au coût de 21,95 $. Pour les commande en ligne : https://www.leslibraires.ca.

Pour revenir à la grande passion de Richard Baillargeon à qui l’on doit aussi la production de revues sur la musique rétro québécoise, nous pouvons écouter son émission sur la webradio Rétro souvenirs

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