Hôtel St-Roch, Québec, à l’épreuve du « feu » : 2 – Un nouveau propriétaire

Suivant la mort de Prudent-Albert Lamonde, l’hôtel St-Roch est vendu à un jeune homme de 31 ans du nom d’Oscar Gilbert. Trois ans seulement après son acquisition, celui-ci voit son immeuble être réduit en cendres. Malgré des pertes importantes, il décide de le reconstruire au cours des mois suivants.

Hôtel St-Roch, Québec, à l’épreuve du « feu » : 2 – Un nouveau propriétaire | 1 août 2021 | Article par José Doré

Crédit photo: BAnQ Québec, P547,S1,SS1,SSS1,D1-10, P353

Suivant la mort de Prudent-Albert Lamonde, l’hôtel St-Roch est vendu à un jeune homme de 31 ans du nom d’Oscar Gilbert. Trois ans seulement après son acquisition, celui-ci voit son immeuble être réduit en cendres. Malgré des pertes importantes, il décide de le reconstruire au cours des mois suivants.

Un hôtel familial

Oscar Gilbert
Oscar Gilbert, propriétaire de l’hôtel St-Roch
Crédit photo: Le Soleil, Québec, 3 juillet 1928, p. 3 (BAnQ numérique)

Un an après le décès de son partenaire d’affaires, Prudent-Albert Lamonde, survenu en février 1919, Jean-Baptiste Jinchereau décide de vendre l’hôtel St-Roch. Il s’assure cependant de garder un pied dans celui-ci. Le 17 avril 1920, Oscar Gilbert, âgé seulement de 31 ans, en devient officiellement le propriétaire[1]. Marié à Alice Lamonde, celui-ci est nul autre que le gendre de feu Prudent-Albert Lamonde.

En plus d’avoir un nouveau propriétaire, l’hôtel St-Roch pourra également compter sur un nouveau gérant en la personne de Joseph-Albert Jinchereau, fils de Jean-Baptiste Jinchereau.

Un fumeur imprudent!

Près de trois ans après en avoir fait l’acquisition, Oscar Gilbert voit son hôtel être détruit de fond en comble par un incendie, dans la soirée du 19 mars 1923. Quelques jours plus tard, les cadavres du docteur Alfred Gaboury, de Donnacona, et de Lauréat Jobin, de Saint-Augustin, sont retrouvés « affreusement mutilés, ensevelis sous les décombres, tournés la face contre terre et voisins l’un de l’autre[2] ». Ceux-ci avaient réservé un chambre au-dessus de la voûte de la Banque Nationale.

Selon Eugène Leclerc, prévôt des incendies, « une cigarette, jetée négligemment par un fumeur, a probablement allumé l’incendie qui a détruit, lundi soir, l’hôtel St-Roch et a causé, si l’on en croit les circonstances, la mort de deux personnes ».

Incendie de l’hôtel St-Roch, 19 mars 1923
Crédit photo: Le Soleil, Québec, 20 mars 1923, p. 16 (BAnQ numérique)

« La cigarette qu’un fumeur imprudent et criminelle [sic] aurait jetée dans un passage aurait roulé jusqu’à une armoire remplie de linges et aurait communiqué le feu à ces linges, c’est-à-dire aux draps, serviettes et la lingerie en général de cet hôtel. »[3]

Entièrement à l’épreuve du feu

Prudent-Albert Lamonde
Prudent-Albert Lamonde
Crédit photo: Le Soleil, Québec, 13 février 1919, p. 12 (BAnQ numérique)

Malgré des pertes importantes, qu’il évaluait le lendemain de l’incendie à près de 200 000 $ pour son immeuble seulement – celui-ci n’étant assuré que pour 120 000 $ – Oscar Gilbert opte pour la reconstruction[4].

Le 12 juin 1923, il obtient de la Ville de Québec un permis pour élever un hôtel de quatre étages, avec toit plat, au coût de 132 000 $. Dessiné par l’architecte Ludger Robitaille, il sera érigé par Jean-Baptiste Jinchereau et Fils, société ayant succédé à Jinchereau et Lamonde après la mort de ce dernier.

Le mois suivant, à l’instar de son voisin et locataire, la Banque Nationale de Saint-Roch fait reconstruire son édifice incendié « en brique solide et en pierre », à deux étages, au coin de la rue Saint-Joseph et de la place Jacques-Cartier, pour la somme de 65 000 $.

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En février 1924, soit moins d’un an après l’incendie, Oscar Gilbert est fier d’annoncer dans le journal Le Soleil la réouverture de son établissement, « le seul hôtel entièrement à l’épreuve du feu à Québec ». Puisque les tragédies restent longtemps gravées dans la mémoire collective, cette caractéristique de l’hôtel sera répétée à la clientèle pendant plus de 25 ans[5].

« L’Hôtel St-Roch, reconstruit à l’épreuve du feu, vient de rouvrir ses portes au public voyageur. C’est là une nouvelle qui sera agréable pour la population de Québec qui voit se relever un de ses grands hôtels modernes et aussi pour le public voyageur. Le seul hôtel entièrement à l’épreuve du feu à Québec. »[6]

Toujours plus haut!

Son immeuble à peine reconstruit, Oscar Gilbert décide aussitôt de le faire rehausser. En 1928, après trois années de travaux d’agrandissement, l’hôtel St-Roch compte désormais 250 chambres. L’année suivante, suivant le déménagement de la Banque Nationale dans l’édifice du Merger (l’actuel 399, rue Saint-Joseph Est), le lieutenant-colonel Oscar Gilbert[7] acquiert l’immeuble de celle-ci au coin de la rue Saint-Joseph et de la place Jacques-Cartier. Selon le journal Le Soleil, « le prix payé par le colonel Gilbert pour la superbe propriété de la banque serait de 130 000 $, s’il faut en croire des gens bien informés[8] ».

Annonce de l’hôtel St-Roch, avril 1928
Crédit photo: Le Soleil, Québec, 14 avril 1928, p. 31 (BAnQ numérique)

Les nouveaux mariés et les ennuis judiciaires

Au tournant des années 40, en plus de convoiter les nouveaux mariés en leur offrant des rabais, l’hôtel St-Roch sait aussi s’attirer des ennuis avec la justice. Ces ennuis surviennent en raison, entre autres, de la loi du repos hebdomadaire, la loi des boissons alcooliques et la loi des salaires raisonnables.

« Oscar Gilbert, propriétaire de l’hôtel Saint-Roch a plaidé coupable à l’accusation d’avoir commis une infraction à la loi du repos hebdomadaire du dimanche, et a été condamné jeudi, à 7$ d’amende et les frais ou à 7 jours de prison par M. le juge Hugues Fortier. M. Gilbert a préféré payer l’amende. »[9]

Annonce de l’hôtel St-Roch, mai 1938
Crédit photo: La Gazette du nord, Amos, supplément, 13 mai 1938, vol. 2, n° 6, p. 3 (BAnQ numérique)

La troisième partie de cette série de trois volets sera accessible le dimanche 8 août. Soyez à l’affut! Revoyez le premier volet : Hôtel St-Roch, Québec, à l’épreuve du « feu » 1 : Un projet ambitieux.

[1] BAnQ Québec, CN301,S357, Notaire Louis Leclerc, 17 avril 1920, n° 42997.

[2] L’Action catholique, Québec, 26 mars 1923, p. 8.

[3] L’Action catholique, Québec, 23 mars 1923, p. 8.

[4] L’Action catholique, Québec, 20 mars 1923, p. 3.

[5] Le Monde ouvrier – The Labor World, Montréal, mai-juin 1950, n° 5-6, p. 6.

[6] Le Soleil, Québec, 23 février 1924, p. 2.

[7] En juin 1927, Oscar Gilbert est nommé lieutenant-colonel honoraire d’une unité militaire québécoise, le C.O.T.C. (Canadian Officers Training Corps), La Salle.

[8] Le Soleil, Québec, 10 janvier 1929, p. 6.

[9] L’Action catholique, Québec, 26 décembre 1936, p. 13.

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