Saviez-vous qu'au coin du boulevard Charest et de la rue Monseigneur-Gauvreau, il y a eu une école durant près de 170 ans? L'emplacement de cette ancienne école correspond à l'endroit où GM Développement érigera un immeuble de 12 étages, soit sur le stationnement situé derrière les défunts Mo Restaurant et Pub Edward.
La maison d’école de la fabrique dite chapelle
Saviez-vous qu’au coin du boulevard Charest et de la rue Monseigneur-Gauvreau, il y a eu une école durant près de 170 ans? L’emplacement de cette ancienne école correspond à l’endroit où GM Développement érigera un immeuble de 12 étages, soit sur le stationnement situé derrière les défunts Mo Restaurant et Pub Edward.
Messire Joseph-Octave Plessis
Le 3 juin 1795, afin de fonder une école dans le faubourg Saint-Roch, Joseph-Octave Plessis, curé de Québec depuis trois ans, fait l’acquisition d’un terrain de 60 pieds de front par 50 pieds de profondeur, borné au sud par la rue des Fossés [boulevard Charest] et à l’ouest par la rue Grant [Monseigneur-Gauvreau]. L’emplacement appartenait à William Grant, un membre du parlement provincial du Bas-Canada et seigneur du fief Saint-Roch. Le 15 août 1796, puisqu’il a déjà fait construire une maison sur son terrain et qu’il souhaite agrandir celui-ci, le curé Plessis ratifie une nouvelle entente avec William Grant [1].
Le Frère Louis et la veuve Morin
Selon le recensement de 1798 et 1805 de la paroisse de Québec, on retrouve dans la maison d’école de la rue des Fossés deux instituteurs, le frère récollet Louis Martinet dit Bonami [2] (1764-1848) et Marie-Marthe Gléné dite Saint-Aignan [3] (1753-1830), veuve de Pierre-Noël Morin. Ces deux personnes ont résidé pendant plusieurs années dans la maison d’école de la fabrique du faubourg Saint-Roch, connue également sous le nom de chapelle. En 1818, environ trois ans après le départ du Frère Louis, Marie-Marthe Gléné, âgée de 65 ans, occupait toujours un des logements de ce lieu d’enseignement, où le maître d’école, Jean-Baptiste Terrien, âgé de 34 ans, était un ancien charpentier marié à Marie-Angélique Dubé [4].
Charles Dion et Angélique Poitras
Le 18 février 1838, la fabrique de Saint-Roch, à qui la fabrique Notre-Dame-de-Québec avait concédé l’année précédente la maison d’école de la rue des Fossés, procède à l’embauche de Monsieur Charles Dion [5]. Ce nouvel instituteur, un ancien marchand de Saint-Athanase [6] [Saint-Jean-sur-Richelieu], tenait depuis deux ans, avec son épouse Angélique Poitras et mère de trois jeunes enfants, une école de garçons et de filles dans le faubourg Saint-Roch [7].
«Monsieur Dion est engagé pour faire l’école, à partir du 1er mai [1838], dans la maison d’école appartenant à la Fabrique. Il remplacera Monsieur [Louis] Racine. Monsieur Dion jouira des pièces de l’école et du jardin à condition qu’il [fasse] le catéchisme à tous les petits enfants qui n’auront pas encore communié [8].»
Les Frères des Écoles chrétiennes
Le 28 mai 1845, un incendie consume plus de 1600 maisons du quartier Saint-Roch, dont la maison d’école tenue par monsieur Dion [9]. En 1851, une nouvelle école est finalement construite à l’angle de la rue des Fossés et de la rue Grant. Celle-ci est confiée, par le curé Zéphirin Charest, non pas à Monsieur Dion, mais aux Frères des Écoles chrétiennes. Lesquels y feront, à partir de 1852, l’enseignement aux jeunes garçons, et ce, durant plus de 110 ans [10]. Cette école, qui porta successivement le nom de Saint-Roch, Sacré-Cœur, Lagueux, Notre-Dame-de-la-Paix et celui d’école commerciale de Québec, a été cédée à la Ville de Québec vers 1974 et démolie peu de temps après.
À quand une statue du Frère Louis ?
Aujourd’hui, rien ne rappelle la présence à cet endroit de la maison d’école de la fabrique érigée par le curé Plessis ni des écoles tenues par les Frères des Écoles chrétiennes. Afin de commémorer ces institutions scolaires, que pensez-vous d’une statue du Frère Louis ou de jeunes écoliers se rendant à l’école de Monsieur Dion devant le futur immeuble de 12 étages de GM Développement ?
«En revenant de l’excursion extra-muros dont j’ai parlé plus haut, je passai chez M. Charles Dion, instituteur au faubourg St-Roch. Il me fit voir son école et ses écoliers. Je ne me serais jamais imaginé le nombre, le bon maintien et la décence de ces enfants, tous ou presque tous d’une figure intéressante et évidemment mus par le désir de s’instruire et le dessein de bien faire. Dans une réunion de plus de cent enfants, j’ai vu moins de remuements, entendu moins de bruit, même en l’absence du maître, qu’il n’y en a dans d’autres de trente ou quarante seulement. Le bon ordre, la régularité, le silence lorsqu’il est commandé, qui règnent dans cette grande école ne peuvent que faire un sensible plaisir aux amis de l’éducation qui en sont témoins. Monsieur Dion paraît se plaire dans sa situation, et non sans raison : ses écoliers sont nombreux, et selon toutes les apparences, sages, tout jeunes qu’ils sont, dociles et avides d’instruction : il est logé décemment et commodément, et possède ce qui manque à beaucoup de particuliers, même riches, dans les villes, un jardin pour l’utilité et l’agrément [11].»
[1] BAnQ, Québec, CN301,S230, Notaire Joseph-Bernard Planté, 3 juin 1795 et 15 août 1796.
[2] Le 14 septembre 1796, huit jours après l’incendie de leur monastère, les Frères Récollets de Québec voient leur ordre sécularisé par Mgr Hubert. L’Abbé Charles Truelle, Le Frère Louis, Lévis, 1898, p. 22-24 et 41-43.
[3] Le 3 février 1777, à l’église Notre-Dame de Québec, Marie-Marthe Gléné dite Saint-Aignan et Pierre-Noël Morin reçoivent la bénédiction nuptiale du commissaire provinciale des récollets du Canada.
[4] BAnQ numérique, Recensements paroissiaux de Notre-Dame-de-Québec, 1798, 1805 et 1818.
[5] Le bulletin des recherches historiques, février 1927, vol. 33, n° 2, p. 71.
[6] Registre de l’église de Saint-Athanase, 17 novembre 1833, folio 104v.
[7] Le Canadien, Québec, 7 octobre 1836, p. 3.
[8] Le bulletin des recherches historiques, février 1927, vol. 33, n° 2, p. 72.
[9] Le Castor, Québec, 2 juin 1845, p. 1 ; 9 juin 1845, p. 2 ; 17 juin 1845, p. 3.
[10] L’œuvre d’un siècle, 1837-1937. Les Frères des Écoles chrétiennes au Canada, Montréal, 1937, p. 334.
[11] En octobre 1842, Michel Bibeau, éditeur et propriétaire de L’Encyclopédie Canadienne, raconte dans son journal littéraire et scientifique son plus récent voyage à Québec au cours duquel il a visité l’école de Monsieur Charles Dion. Encyclopédie Canadienne, octobre 1842, tome 1, n° 8, p. 310-311.
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