Christine, la reine-garçon : quatre rappels de salutations

Le Théâtre La Bordée présente jusqu'au 11 mai Christine, la reine-garçon, une pièce qui mélange amour, philosophie et politique autour d'une reine qui ne désire qu'une chose, son libre arbitre.

Christine, la reine-garçon : quatre rappels de salutations | 19 avril 2019 | Article par Jason Duval

Crédit photo: Nicola-Frank Vachon

Le Théâtre La Bordée présente jusqu’au 11 mai Christine, la reine-garçon, une pièce qui mélange amour, philosophie et politique autour d’une reine qui ne désire qu’une chose, son libre arbitre.

Il faut nous transporter en Suède, au 17e siècle, où Christine règne sur un pays depuis sa tendre enfance. Un règne avant-gardiste où une femme dirige un territoire comme un homme, puisque Christine a tout d’un mâle.

On découvre rapidement que cette reine-garçon veut gouverner selon ses principes et n’a jamais rien voulu savoir d’assurer, par une relation intime, sa succession.

Au courant de cette pièce, nous découvrons aussi qu’en plus de diriger comme un roi, Christine a les manies d’un homme et même des désirs déviants… pour l’époque.

Personnages complexes

Joué de façon relevée par Marianne Marceau, on a l’impression que le rôle de Christine, la reine-garçon, a été écrit pour elle.

Elle est entourée de neuf comédiens, dont Simon Lepage, qui s’accapare la lumière en interprétant le comte Johan Oxenstierna, le fils du chancelier de Suède, avec beaucoup d’humour. Un comte prétentieux en quête de beauté naturelle, de charme et de séduction dont la vanité ne vient en rien charmer Christine.

On note aussi la présence de Jean-Michel Déry, dans le rôle d’un philosophe français, qui s’emploie à troubler les nombreux questionnements de la reine. C’est le penseur, par son côté rationnel, qui met en relief le côté émotionnel de Christine, pour qui la compréhension des sentiments est plus forte que tous les pouvoirs et que la satisfaction de gouverner la Suède. Elle se laissera aller, dans cette tempête de sentiments, jusqu’à en oublier son pays.

Durant toute la pièce, un étrange personnage albinos joué par Vincent Michaud, parlant uniquement le suédois et ressemblant à Manon Massé, apparaît tel un fantôme. Mis à part la reine-mère en deuil, aucun personnage ne semble prêter attention à cet être qui déambule avec une présence dramatique exceptionnelle.

Tous ces personnages évoluent dans un décor très sombre, presque inquiétant, dans une mise en scène assurée et réussie par Marie-Josée Bastien. Sur fond noir et gris, les comédiens jouent un théâtre ardu. Le texte de Michel Marc Bouchard est écrit dans un français que bien des générations ne comprendraient pas. Un vocabulaire recherché, qui vient teinter l’humour inattendu de Christine, la reine-garçon. La fantaisie s’arrête parfois brusquement par les tragédies intérieures de Christine.

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Une pièce en deux temps

Dès les premiers instants de la pièce, le public est saisi par cette ambiance de mystère, puis rapidement, les premiers rires en coin apparaissent. Des sourires qui deviendront des éclats de rire, durant une première partie qui mélange grandes questions existentielles et blagues intellectuelles.

Il ne faut que quelques minutes aux spectateurs pour comprendre la complexité de cette reine-garçon, qui dirige la Suède d’une main de fer. Une autorité qui fait pâlir son entourage masculin.

C’est cette autorité qui gruge Christine, qui lui en fait oublier les sentiments plus personnels. Des émotions réveillées par une déviance, un sujet tabou pour l’époque. C’est la découverte de cette déviance qui mettra fin à la première partie, sur un cri dramatique.

Après un entracte mérité, les comédiens reviennent pour une seconde partie beaucoup moins drôle, mais pas moins intéressante. Les drames s’enchaînent, les émotions de désespoirs et des coup de théâtre fabuleux viennent agrémenter le jeu des comédiens, devenus tragédiens.

La reine se casse dans cette partie de la pièce. Cette femme, qui semblait n’avoir d’amour que pour les batailles de son pays, devient soudainement fragile, au bord du gouffre. Une fragilité amenée par des sentiments inattendus et inconnus. Des envies qui la mènent jusqu’en France où elle retrouve sa grandeur pour les quelques derniers instants de la pièce.

Une pièce risquée, un texte osé, mais il fallait entendre les quatre rappels de salutations des comédiens, pour se rendre compte du succès.

Christine, la reine-garçon est présenté au Théâtre La Bordée jusqu’au 11 mai.

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