À travers le regard de Matéo
Matéo est étudiant en cinéma. Il connaît bien le 7e art, en est passionné. Il habite avec sa soeur. Tous les vendredis soirs, il se fait des soirées cinéma avec son meilleur ami Justin. Il vit avec le syndrome d’Asperger et il est le personnage central de Matéo et la suite du monde, pièce présentée au Théâtre de La Bordée jusqu’au 13 février.
Se sentir envahi
Durant un cours de cinéma, donné par son réalisateur préféré, où la classe discute du film Pour la suite du monde de Pierre Perreault et Michel Brault, Matéo lève la main pour poser une énième question. Mais, envahi par milles pensées, informations, idées… il reste figé, la main en l’air, longtemps, trop longtemps, au grand désespoir de son professeur.Ce dernier et Maria, la preneuse de note – amie et béguin de Matéo –, tentent de le faire revenir à la réalité, mais Matéo reste figé à la merci de ses pensées, submergé par un lot d’informations : il cherche sa question, ses questions, ne sait plus. Et nous, spectateurs, nous le suivons. Nous nous sentons envahis, tout comme lui.
Une forêt, une île, une classe, des fantômes : le monde intérieur de Matéo
Absorbé, envahi, Matéo est pris dans son monde intérieur alors que dans le réel, il reste là, figé la main en l’air. Son professeur et Maria tentent de trouver le moyen de le réveiller, de le ramener dans le réel.Son monde intérieur est représenté par un décor qui ne change pas, qui est à la fois une forêt sombre où perce la lumière, une île (celle du film de Perrault ?), une salle de classe, un parc.Et c’est là que Matéo revit ses souvenirs, affronte les fantômes et pensées qui le hantent : amour, désir, amitié, absence du père, départ de la mère, angoisses de la soeur, pression du monde extérieur et de son monde, envie de s’isoler ou de s’accomplir, désirs des autres, questionnements.Recherche de soi, compréhension des autres, Matéo évolue dans son espace intérieur, apprend à comprendre la suite du monde avec son regard tout singulier.
Théâtre de la marge
Matéo et la suite du monde, c’est un questionnement sur l’apport des pères et sur le cinéma. Mais c’est surtout une réflexion sur le sentiment d’envahissement que ressentent les gens qui vivent avec l’autisme ou le syndrome d’Asperger dans un monde où nous sommes tous inondés par une multitude d’informations tous les jours et où nous pouvons perdre pied.Même si la pièce est un univers intérieur qui nous semble irréel, il y a une simplicité et un réalisme qui touchent dans le jeu des acteurs, dont Mathieu Bérubé-Lemay (Matéo) et Julien Fiset-Fradet (Justin), comédiens et artistes à Entr’actes vivant tous deux avec l’autisme. Leur jeu à la fois touchant et plein de vérité nous transporte dans l’univers de l’autre. Ils nous amènent à nous questionner, à nous voir à travers leurs yeux.À leurs côtés, trois comédiens professionnels les appuient et leur laissent tout l’espace nécessaire avec aisance : Frédérique Bradet, Marie-Hélène Gendreau et Jack Robitaille.N’hésitez pas : allez voir cette pièce et regardez le monde et sa suite à travers le regard de Matéo.La pièce est une coproduction de La Bordée et d’Entr’actes mise en scène et écrite par Jean-François F. Lessard, directeur artistique d’Entr’actes. Entr’actes est un organisme culturel de Québec qui a pour mission de développer, créer et diffuser un art unique, fait avec des personnes ayant des limitations fonctionnelles.Matéo et la suite du monde est présentée au Théâtre de La Bordée jusqu’au 13 février.
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