Les Liaisons Dangeureuses
Les Liaisons dangereuses est la dernière pièce de la saison 2013-14 à La Bordée. Mise en scène par Érika Gagnon, elle est l’adaptation d’un roman épistolaire écrit au XVIIIe siècle par Pierre Chordelos de Laclos. La première a eu lieu mercredi dernier et j’étais assise dans la salle. J’attendais cette pièce avec beaucoup d’impatience : depuis mes 15 ans, j’ai dû lire le roman 15 fois, voir toutes les adaptations cinématographiques… Mais je n’avais pas eu l’occasion de voir une mise en scène de cette correspondance sur les planches. Je suis donc entrée au théâtre ce soir là avec beaucoup d’attentes. Et de connaissances du texte, des personnages, de l’histoire.L’intrigue tourne autour de deux nobles libertins, la marquise de Merteuil et le vicomte de Valmont. Anciens amants, ils « jouissent » de la vie et en font un jeu dont ils fixent eux-mêmes les règles au gré de leurs « fantaisies » du moment.Et au moment où se passe l’intrigue de la pièce, le Vicomte planifie de séduire la présidente de Tourvel, femme mariée et aimante, mais surtout dévote et vertueuse. Un défi que la Marquise le croit incapable d’accomplir sans se ridiculiser. La marquise de Merteuil, de son côté, veut se venger d’un ancien amant, monsieur de Gercourt, en débauchant sa jeune et naïve future épouse fraîchement sortie du couvent, Cécile de Volanges — elle espère amener le Vicomte à initier la petite aux plaisirs. Et je peux vous dire que mon résumé est simpliste et très loin de vous montrer toutes les ramifications qui « lient dangereusement », tous les protagonistes.Manipulations, lettres secrètes, fausses confessions, clés volées, serviteurs-espions, double jeu… Rien n’est écarté pour parvenir à leurs fins. Mais comme le dit si bien la Marquise elle-même : « La vanité et le bonheur sont incompatibles ».La mise en scène en toute simplicité laisse la vedette aux intrigues et aux personnages et leurs histoires. Le décor et les costumes inspirés du XVIIIe, mais aussi des années 50, nous rappellent que le temps n’a pas d’emprise et que surtout cette histoire n’a pas d’âge : elle pourrait se passer aujourd’hui.La scénographie et la mise en scène sont comme le récit : elles soulignent les différents niveaux et surtout le fait que l’intrigue originale provient d’une correspondance. La Marquise, le Vicomte et les autres personnages sont souvent présents sur scène, sans être au centre de l’intrigue. Ce stratagème rappelle qu’ils sont l’objet d’échanges de lettres, de manipulations et que, surtout, leurs vies sont entre les mains (et connues) des deux protagonistes. Le jeu d’acteur est à la hauteur, surtout celui de Cécile de Volanges qui mélange l’innocence de la jouvencelle du XVIIIe, l’enthousiasme et la candeur des années 50. Elle nous a bien fait rire. Valmont aussi. Même si, dans ma vision idéalisée du libertin qu’il est, j’aurais aimé parfois qu’il soit un peu plus en finesse. Mais bon, comme je l’ai déjà dit, mes attentes étaient énormes.Soulignons aussi Madame de Tourvel qui a joué tout en retenue, en souffles coupés… Une belle performance. Quant à Merteuil, le personnage était grand comme il se doit. En ambition, en amour caché, en colère… Même si parfois, peut-être, des silences auraient pu venir soutenir ses affirmations. Laisser les mots habiter le théâtre pendant quelques secondes. J’avais parfois l’impression que les mots s’envolaient un peu trop vite, alors que la pièce repose sur des mots échangés, volés. Mais malgré cela, Merteuil était Merteuil, séductrice, en contrôle.Une belle soirée et une pièce à ne pas manquer. Rires, scandales et émotions. Jusqu’au 10 mai au théâtre La Bordée. http://www.youtube.com/watch?v=WfE0VqAtETE
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