Danse de nuit : le happening dansé de Karine Ledoyen

Danse de nuit - Crédit photo: David Cannon
Toutes les photos sont de David Cannon.

Avec Danse de nuit,  Danse K par K explore ce qui s’apparente beaucoup à une performance artistique jumelée à la danse plutôt que de proposer un spectacle de danse habituel.

Steve Huot, le directeur général et artistique de La Rotonde l’a souligné lors de son mot de bienvenue : pour sa 20e saison, le diffuseur spécialisé en danse contemporaine ose sortir du cadre habituel dans sa programmation. À ceux qui s’attendent à un spectacle de danse en assistant à Danse de nuit, soyez avertis : on a affaire ici à une performance artistique très théâtrale, où plusieurs moments de danse viennent agrémenter l’expérience.Danse de nuit - crédit photo: David Le travail de Karine Ledoyen, chorégraphe et directrice artistique de Danse K par K, est souvent teinté de théâtralité. Pensons à Danse de garçons, où elle a chorégraphié un spectacle pour six comédiens et un danseur. Les comédiens avaient peu ou n’avaient pas dansé dans leur carrière, amenant un côté brut et théâtral à la danse contemporaine. Avec Danse de nuit, Karine Ledoyen a une approche différente : elle met en scène deux danseurs professionnels, Fabien Piché et Odile-Amélie Peters, en plus de se mettre en scène elle-même, en intégrant quelques moments chorégraphiés. Elle retrouve aussi ses fidèles collaborateurs : Patrick Saint-Denis à l’environnement sonore, Sonoyo Nishikawa aux éclairages et Ginelle Chagnon à l’assistance chorégraphique.

Performance artistique teintée de danse contemporaine

Danse de nuit - Crédit Photo: David CannonDanse de nuit présente plusieurs tableaux, toujours à la limite du confortable. Chacun peut être perçu comme rempli d’amour ou plein de violence. La ligne est mince, particulièrement dans un des duos de Piché et Peters. On y voit Odile-Amélie Peters tenter de ramener son amoureux dans le lit, alors que ce dernier « fait le mort ». La scène semble pleine de dévotion lorsqu’elle est regardée telle quelle, mais Karine Ledoyen, qui est aussi sur scène, filme le tableau, en choisissant ce qu’elle projette au public. Ses cadrages serrés orientés surtout sur l’anatomie de la danseuse confèrent à la scène un côté pornographique et surtout très voyeur.L’amie qui m’accompagnait, travailleuse culturelle en arts visuels, m’a souligné que plusieurs particularités du spectacle rappellent la tradition du happening, de l’art de la performance en arts visuels. Une grande place est d’ailleurs laissée au hasard et à la spontanéité. Bien qu’une trame de fond oriente l’oeuvre, l’artiste se laisse souvent guider par l’ambiance, ses propres gestes, ses émotions ou la foule réunie. C’est le chemin qu’a semblé prendre Karine Ledoyen lors de ses interventions ponctuelles au public : la chorégraphe s’adresse directement à l’assistance chaque fois qu’elle prend la parole. Le spectateur est par ailleurs inclus dans la performance d’une manière ou d’une autre – comme regardeur-voyeur ou comme acteur de l’événement. C’est non sans un certain malaise que le regardeur est regardé en retour par une caméra qui sonde le public. À d’autres moments, il assiste à un duel de danse ou les partenaires d’écorchent, se trainent, s’essoufflent et s’étouffent.

Danse de nuit - Crédit photo: David CannonUn environnement sonore qui habille

La musique contribue également à l’émotion vive et déroutante des tableaux. Patrick Saint-Denis frappe encore en habillant littéralement le spectacle avec l’environnement sonore qu’il crée. Grâce à plusieurs bracelets spéciaux, il joue avec les ondes sonores, créant ainsi une ambiance grinçante ou permettant d’accentuer l’intensité des propos de la chorégraphe. Chargé d’une profondeur vive, l’un des tableaux combine les vrais battements du cœur de la danseuse avec la musique, pour créer une trame sonore intense, dont la vitesse s’ajuste aux battements de cœur.Karine Ledoyen signe ici un spectacle déroutant et recherché, mais où quelques tableaux auraient pu être poussés plus loin. Danse de nuit aborde la nuit dans son côté plus tabou, en évoquant l’amour, le sexe, la violence, le malaise, le combat, la peine d’amour, la dévotion. Cela tombe sous le sens que ce spectacle, qui prend plus la forme du happening que du spectacle de danse contemporaine habituel, soit présenté à la Salle multi de la Coopérative Méduse, pôle majeure de la production et de la diffusion en art contemporain au Canada.

Danse de nuit - Crédit photo: David Can

Danse de nuit est présenté à la Salle multi de Méduse les 26-27-28 octobre à 20 h. Voir les détails à l’agenda Monsaintroch.

L’auteure de ces lignes collabore parfois avec Danse K par K en tant que consultante en communications.

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